Le compte rendu d’un entretien peut-il être assimilé à une sanction ?

Publié le : 24/05/2022 09:50:28
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Le compte rendu d’un entretien peut-il être assimilé à une sanction ?

Lorsqu’un salarié commet une faute ou fait preuve d’une insuffisance professionnelle sur une partie
de sa mission de travail, il est recommandé, pour l’employeur, d’organiser un entretien avec le
salarié pour trouver une solution.

Cet entretien doit donc permettre à l’employeur, ou le manager, d’expliquer au salarié ce qui lui est
reproché et au salarié de pouvoir s’expliquer. Les éléments mis en avant peuvent autant porter sur le
comportement du salarié au sein de l’entreprise que sur des points spécifiques à la mission de travail.
Au cours de l’entretien, l’objectif est également de trouver une solution pour remédier à la situation
problématique.

Lorsque l’employeur organise un entretien de ce type, dit entretien disciplinaire, celui-ci peut avoir
recours à la rédaction d’un compte rendu de l’entretien afin de conserver une trace des échanges. Ce
compte rendu pouvant être conservé autant par le salarié que par l’employeur.

Toutefois, ce compte rendu d’entretien pourrait-il être assimilé à une sanction ? C’est sur cette
question qu’est venue se positionner en février dernier la Cour de cassation (N° de pourvoi : 20-
13.833).

En effet, un employeur a reçu un salarié en entretien pour lui faire part d’un comportement
problématique à plusieurs égards. Parmi les éléments comportementaux reprochés, l’employeur
avait notamment relevé « l’attitude dure et fermée aux changements du salarié ». Cette attitude
avait conduit les collaborateurs à remonter des plaintes sur sa personne du fait de la situation de
souffrance au travail dans laquelle il les entraînait. Un compte rendu de l’entretien a ensuite été
produit.

Pour déterminer si ce compte rendu d’entretien relève d’une sanction, il faut tout d’abord définir ce
qu’est une sanction.

L’article L 1331-1 du code du travail définit la sanction comme « toute mesure, autre que les
observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par
l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la
présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ».

En l’espèce, le compte rendu produit par l’employeur faisait part de cinq reproches et incluait les
phrases « votre savoir être et votre savoir-faire se doivent d'être exemplaires face aux responsabilités
que vous avez dans l'entreprise » et « nous vous demandons un changement complet et total de votre
savoir être et savoir-faire, et ce sans délai ».

Suite à l’entretien l’employeur a également engagé une procédure de licenciement pour motif
disciplinaire en reprenant les mêmes reproches faits aux salariés lors de l’entretien. Une même faute
ne pouvant être sanctionnée qu’une seule fois par l’employeur, la Cour de cassation a donc dû
déterminer si le compte rendu du premier entretien constituait ou non une sanction.

La rédaction du compte rendu, comprenant des reproches et une incitation à changer de
comportement, a donc amené la Cour de cassation à considérer que cet écrit constituait un
avertissement à destination du salarié le sanctionnant de son comportement.

Par conséquent, lorsqu’un compte rendu d’entretien ne fait pas état des échanges des deux parties
mais constitue un résumé des éléments reprochés au salarié, celui-ci est bien assimilable à une
sanction disciplinaire et ne peut donc pas donner lieu par la suite à un licenciement.

En revanche, si le compte rendu reprend, de manière objective, l’ensemble des éléments mis en
avant par l’employeur et par le salarié, alors il s’agit d’un compte rendu non assimilable à une
sanction.

A noter que lors d’un entretien disciplinaire, un élu CSE peut assister le salarié, et peut ainsi lui-
même établir un compte rendu qu’il pourra remettre au salarié et à l’employeur.

Cette règle, du reproche assimilé à une sanction, lorsqu’il est adressé sous la forme écrite, a déjà
donné lieu à une jurisprudence en 2014 ( N° de pourvoi : 13-10.939). Il était alors question d’un
reproche formulé dans le corps d’un mail mais dont l’objet du mail était intitulé « notre entrevue de
ce matin : rappel des règles en matière de paiement par Carte Bleue ».

Ainsi, peu importe la dénomination du document, si celui-ci fait part de reproches ou impose des
règles de conduite au salarié, alors ce courrier est constitutif d’une sanction à l’égard du salarié.

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